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Le livre se penche sur l’histoire des relations franco-russes sous le Second Empire en France. La d?faite de la Russie dans la guerre de Crim?e (1853–1856) ouvre une nouvelle page dans ces relations. L’Europe devient t?moin du rapprochement inattendu des deux anciens adversaires – la Russie et la France. A Londres, Berlin, Vienne et Constantinople, nombreux sont ceux qui craignent qu’un tel rapprochement ne d?bouche sur une alliance politique entre le jeune tsar Alexandre II et l’empereur des Fran?ais Napol?on III.

Quels sont les motifs ? la base du rapprochement entre les deux r?cents ennemis? Qui et pourquoi – d’Alexandre ou Napol?on – est ? l’origine de ce processus? Comment s’est d?velopp?e la relation entre la Russie et la France apr?s la fin de la guerre de Crim?e? En quoi convergeaient ou divergeaient les positions de Saint-P?tersbourg et de Paris? Existait-il un espoir s?rieux de sceller une telle alliance entre les deux pays, et pourquoi celle-ci n’a fi nalement pas eu lieu?

Ces questions et bien d’autres ? l’ordre du jour des relations franco-russes dans la p?riode comprise entre la guerre de Crim?e et celle entre la France et la Prusse (1870–1871) font l’objet d’une ?tude approfondie dans ce livre, ?crit sur la base des archives diplomatiques de Moscou et Paris (l’auteur a ?tudi? en tout plus de 200 volumes de documents d’archives non publi?s).

Piotr Tcherkassov en conclut que le rapprochement entre la Russie et la France apr?s la guerre de Crim?e n’avait pas de fondement solide et ne pouvait donc ?tre durable. Cette convergence se fondait largement sur des vis?es «r?visionnistes» non conciliables de Saint-P?tersbourg et Paris. Alexandre II esp?rait pouvoir compter sur Napol?on III pour la suppression des dispositions discriminatoires ? l’encontre de la Russie contenues dans le trait? de Paris de 1856, instituant la «neutralisation» de la mer Noire. Pour sa part, l’empereur fran?ais recherchait le soutien du tsar dans sa tentative de revoir les trait?s de 1814–1815 impos?s ? la France et qui lui faisait r?int?grer ses fronti?res de 1792.

Parall?lement ? cela, tant Alexandre II que Napol?on III nourrissaient leurs propres aspirations intimes peu compatibles avec la volont? affi ch?e de forger une «entente franco-russe». Tout en se lan?ant en 1856 dans un dialogue avec le tsar, l’empereur des Fran?ais, rest? fi d?le ? l’union avec l’Angleterre, cherch? ? enfoncer un coin dans l’unit? de la Sainte Alliance (Rus sie, Autriche, Prusse) form?e en 1815 contre la France. Quant ? Alexandre II, en saisissant la main tendue de Napol?on, il esp?rait d?tacher Paris de Londres tout en maintenant une relation de confi ance avec Berlin.

Toutes ces tendances divergentes ?taient encore aggrav?es par l’incompatibilit? id?ologique des deux r?gimes, qui s’est manifest?e de la fa?on la plus ?clatante lors de l’insurrection polonaise de 1863, quand la France a soutenu les Polonais contre la Russie qui les opprimait. L’autocrate russe, au lib?ralisme tout relatif, s’est toujours m?fi ? du bonapartisme – syst?me h?rit? de trois r?volutions (1789, 1830, 1848) et de l’empire napol?onien. Le tsar ne croyait pas ? la stabilit? de ce r?gime, qui fl irtait dangereusement avec le parlementarisme et le lib?ralisme, avec les d?mocrates voire m?me avec les socialistes.

Alexandre II redoutait la politique ?trang?re aventuriste de l’empereur des Fran?ais, s’exer?ant aussi bien en Europe que dans le Nouveau Monde (exp?dition au Mexique de 1862 ? 1864). Le tsar, craignant avant tout de se retrouver dans les entreprises aventureuses de son «alli?» fran?ais, demeurait extr?mement prudents ce qui a son tour provoquait l’irritation et la d?ception croissante de Napol?on III envers les r?sultats de son rapprochement avec la Russie.

Alexandre II, que poursuivait le «cauchemar de l’ann?e 1856» avait lui aussi ses raisons de se montrer m?content de Napol?on, ce dernier se d?robant sans cesse ? sa promesse d’aider la Russie ? se d?barrasser des limitations impos?es par le trait? de Paris de 1856. Le tsar ne se lib?rera d’ailleurs de ce cauchemar qu’en octobre 1870, peu de temps apr?s la chute de Napol?on III.

Comme lors de toutes les p?riodes pr?c?dentes, la France sous le Second Empire a continu? de consid?rer la Russie comme une puissance europ?enne inf?rieure au regard des normes occidentales. La conviction, partag?e par la classe dirigeante et la soci?t? fran?aises de la r?alit? des r?formes sociales et administratives engag?es par Alexandre II a certainement rendu bien plus attrayante et moderne la «fa?ade» de l’empire russe. Mais ces r?formes n’ont pas chang? l’essence profond?ment autoritaire du syst?me politique russe, toujours tr?s ?loign? des valeurs lib?rales europ?ennes.

Finalement les intentions d’Alexandre II et Napol?on III et leur r?ve initial d’une alliance entre la Russie et la France ont ?chou? en raison de la pr?maturit? d’une telle union. Le contexte europ?en de la seconde moiti? des ann?es 1850 et de la premi?re moiti? des ann?es 1860 ne rassemblait pas les conditions n?cessaires ? un tel rapprochement. Une telle union ne sera possible et effectivement mise en oeuvre que vingt et un ans apr?s la chute du Second Empire, dont la perte sera le point de d?part pour un nouveau rapprochement entre Saint-P?tersbourg et Paris.

Piotr TCHERKASSOV – historien russe reconnu, il est l'auteur de nombreux ouvrages sur l'histoire de France et de Russie – dont Lafayette, Le Cardinal de Richelieu, L'Aigle ? deux t?tes et le lys royal, ?lisabeth Petrovna et Louis XV, Catherine II et Louis XVI, Un agent russe en France: Jacques Nikola??vitch Tolstoy…

Piotr TCHERKASSOV est le chevalier de la L?gion d'honneur, le chevalier des Palmes acad?miques, Medaille d'argent du m?rite francophone (Renaissance fran?aise), Prix Anatole Leroy-Beaulieu (Ambassade de France en Russie), M?daille d'or Soloviev, Prix Tarl? (Acad?mie des sciences de Russie).